DORDOGNE
La
Dordogne coule sous la terrasse, vive comme une eau de roche,
fantasque, tourbillonnante. Au soleil, la terrasse a mille attraits: le
lézard pressé qui s'engouffre dans un vase de pétunias, en ressort
hardiment, muse sur le rebord, court, disparaît; le cactus géant levant
vers le ciel ses trois bras épineux; le banc chaud et blanc où il fait
bon venir s'asseoir.
Las!
Les Anglais ont envabi les lieux. Les deux dames fraîches et
irréprochables portent leur soixantaine en robe blanche et bleue,
correctes, pondérées, la joue rose.
L'un
des époux s'est affalé sur un transat. Rouge et bavard, il attend
l'autre. Le voici. Gardons notre flegme puisqu'il garde le sien. Nanti
d'un petit chapeau blanc en toile à bords recourbés, comme en portent
parfois les enfants à la mer, son profil d'oiseau s'abrite du soleil.
Un short découvre de maigres jambes nues, qui s'en vont explorer la
France. Les Anglais croisent et saluent un couple hollandais en bas
trois-quarts blancs, la lourde bottine soutenant de solides mollets de
marcheurs.
Une
hirondelle vole haut. Le ciel est infini. Titan, le chien, passe pour
un bonjour affectueux. Deux voyageurs apparaissent en haut de
l'escalier venant du jardin, encombrés de bagages. La jeune servante
les précède. Une autre chante dans le couloir en passant l'aspirateur.
Aujourd'hui, la terrasse est un lieu de passage. Tantôt, qui sait,
sera-t-elle un lieu de détente.
LORRAINE