LE FEU D'AUTOMNE
(En souvenir du passé!)
Quand les soirs de septembre deviennent frisquets, quand octobre roussit le jardin, s’en reviennent les amis d’automne. Ils savent que la maison abritent une pièce basse, dont on ferme bien les volets lorsqu’il pleut et vente. Et que là, un vieux divan fatigué et robuste, une table basse, des fleurs et un chat silencieux qui a complaisamment lacéré de coups d’ongles le tapis fané, les accueilleront fidèlement.
C’est la salle où l’on cause, où les hommes fument, où l’on boit la bière en parlant de soi. Une pièce pour les amis, resserrée, intime, mais dotée, ô joie, d’une grande cheminée où le bois danse comme un dieu délivré.
- Si je faisais une flambée, qu’en dis-tu ?
C’est le mot du premier arrivant et je dis oui, pour le plaisir de les voir tous s’activer en rond autour de ce feu qui flambe, craque, rougeoie, s’anime tandis que les femmes, assises, regardent et ne font rien.
Je n’en connais pas un qui soit indifférent au plaisir de raviver la flamme au soufflet ou de ramener, à l’aide des pinces, une brindille vagabonde. Ils aiment les flambées d’un instinct très ancien, venu du fond des âges et nous savent gr é d’avoir une pièce basse où l’on peut, après avoir mis l’étincelle, étendre les jambes devant l’âtre.
L’amitié se satisfait d’accords tacites. Nous avons en commun tant d’années de jeunesse, tant de souvenirs et tant d’indulgences que le feu d’automne nous rassemble d’un même cœur, simple et tranquille.
Quand ils s’en vont, nos amis laissent des cendres, l’odeur de tabac mêlée à celle des bûches, leur désordre bon enfant et la promesse de revenir. Et ils reviennent. Pour le feu de bois, sans aucun doute. Pour nous aussi, je crois.
LORRAINE
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