HORLOGE
Implacable
horloge au doux bruit d’argent, te rappelles-tu les heures enfuies ? Tu
vas, tu vas, et nous suivons. Ta sournoise patience a raison de nos joies et de
nos peines. Tu défais les serments et tu effaces les souvenirs, mais c’est toi
aussi qui donne l’espoir à la jeune fille ou ramène l’enfant prodigue.
Ta
route a pour chacun l’épine cruelle et tu sonnes l’heure des chagrins aussi
gaillardement que celle des épousailles. J’écoute ton insouciance tinter dans
les maisons : personne ne songe que ton irrésistible course nous grignote
l’âme. Tu as sonné pour ma naissance ; tes aiguilles ont marqué mes vingt
ans ; et tant et tant d’années ont fui que tu scandas sans que j’y
songe !
Rien
n’arrête ton élan, horloge immuable, mais donne-nous au moins le don de bonheur, celui d’estimer une à une toutes
tes heures. Et puisqu’à mesure que tu marches nous déclinons, fais qu’à cette dernière heure nous puissions fermer les yeux
sans amertume, riches de tout un passé que nul regret ne ternira.
LORRAINE
Photo: www.poulbenn.com