LA VICTOIRE DE SAMOTHRACE
C’est au début du cycle scolaire secondaire que l’on nous initia à l’Histoire de l’Antiquité. J’avais 14 ans, un peu moins, un peu plus. J’écoutais d’une oreille, il faisait beau, la fenêtre ouverte donnait sur la cour où les marronniers bruissaient de nids, et je volais en pensé avec les moineaux.
Et puis, on nous montra des planches et je reçus la « Victoire de Samothrace » en plein cœur. Pourquoi cet émoi ? pourquoi cette passion soudaine ? Pourquoi cet amour inconditionnel pour les ailes prêtes à voler, le buste tendu, le linge dessinant les formes, les jambes, la poitrine, toute cette beauté sculptée qui soudain m’enivra ? Sait-on pourquoi on aime ? Je reçu dans une acceptation totale l’image de cette femme sans tête dont le frémissement se transmettait àfrémissement -Musée du Louvre - moi.
Bien plus tard, je fis sa connaissance au Musée du Louvre. Nous restâmes face à face un long moment. Je la reconnaissais. Elle, je crois, me reconnaissaitelle vit - inextinguible pouvoir - aussi. J’avais du mal à la quitter, même si Vénus m’appelait, elle aussi. J’avais du mal...Venir à Paris pour voir « vraiment » la Victoire de Samothrace, c’était un grand bonheur. Elle est restée tellement dans mes yeux, dans mon souvenir, que je n’ai aucun besoin d’aller la revoir : elle vit, elle va s’élancer, elle s’élance...Pour quels cieux ? Qu’importe ! Je l’ai vue et je l’ai aimée, comme à 13 ans, comme au moment où mes yeux se sont ouverts à l’art et à son inextinguibles pouvoir d’absolu.
Je pense à elle quand j’ai besoin de m’envoler. De partir je ne sais où. Elle m’emmène. Vous l’ai-je dit. C’est une déesse .
Musée du Louvre
LORRAINE