LE FOURRE-TOUT DE MES PENSEES
Le fourre-tout de mes pensées se révolte contre ma maîtrise. C’est vrai, ça, je suis une femme organisée, ordonnée, lisse ; je ne veux déranger personne, je suis discrète, compréhensive, je pèse mes mots pour ne pas blesser, pour ne pas non plus épancher trop de moi-même.
Et tout à coup, une brise de révolte m’effleure. Une brise qui enfle, se fâche un peu, se fâche beaucoup. Parce qu’en fait, j’ai envie de raconter des choses sans importance, qui se débrideraient, diraient qu’aujourd’hui est un jour sans couleur, que je le porte un peu comme une croix . Me plaindre, moi, jamais ! Et alors ? Qu’y a-t-il de si monstrueux à avouer que certaines heures n’ont aucun goût, qu’elles sont neutres, inodores et se traînent. Que j’hésite à décider si oui ou non je vais ranger le bureau, faire la sieste, ou prendre une douche bien tonique pour m’éveiller tout à fait ? Que j’ai envie de me faire les ongles en amande, de les plonger dans de l’huile d’olive parfumée de citron, pour qu’ils reprennent vie, car les antibiotiques du mois passé les ont striés et appauvris. Que ma fille vient de m’envoyer des photos d’autrefois qui réveillent le passé.
Un passé, c’est à la fois heureux, vigoureux et un peu triste. On s’y retrouve comme on y était, comme on n’est plus. Le temps change de mode, le visage garde son expression enjouée mais griffe le coin du regard, creuse un pli près de la bouche. Et si d’habitude je m’en moque, aujourd’hui c’est moins facile. Alors je l’écris...
Et le fourre-tout de mes pensées vous l’avez sous les yeux. On appelle cela « se lâcher », je crois ? Et je sais que vous pardonnerez cette faiblesse...passagère !
LORRAINE