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ECLATS DE PAROLES
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ECLATS DE PAROLES
26 mai 2009

LE FANTOME

   J’avais vingt ans, je venais de quitter cette maison que j’aimais et qui noyait sa solitude dans l’obscurité de l’hiver. Il faisait froid, un de ces froids qui hurlent à la mort dans les quartiers citadins. Je rentrais du bureau. J’avais un peu mal à l’âme, comme on s’émiette certains soirs brumeux qui ôtent toute espérance. Sur un coup de tête, j’ai pris le chemin de la maison vide.

    Je la connaissais bien, elle et son réverbère éclairant l’escalier VirginiaWoolffantomatique. Je ne suis pas peureuse. Donc je suis entrée, j’avais gardé la clef comme une amulette, dites-moi pourquoi ?

    Sans effort, je suis montée jusqu’au second où j’avais  ma chambre-bureau, il n’y a pas si longtemps. Rien. Personne. Le silence. Le bruit maugréé du vent. L’ombre floue de ma silhouette, la porte que j’ouvre. Rien... Rien ? Je tends l’oreille. Non, je rêve. Non, personne ne monte. Non, je n’entends pas vraiment ce frôlement sur le mur comme une main qui effleure. Non...Je ne bouge plus. J’attends. Je sais qu’il y a quelqu’un. Quelqu’un d’invisible, une ombre impalpable, un personnage venu d’où ? La main sur le mur effleure toujours, la caresse s’arrête à l’étage où je suis, mon cœur bat...Un imperceptible vertige m’inonde d’une certitude éblouissante : là, dans cette maison vide, quelqu’un vient à moi, quelqu’un d’un autre monde et qui à des choses à me dire...

    J’ai attendu. Longtemps. L’effleurement a cessé. La visite a pris fin. Je suis redescendue. Oppressée et pourtant heureuse d’un étrange bonheur inconnu.

    Rentrée chez moi, j’ai machinalement regardé le calendrier : nous étions le 28 mars. Pour beaucoup, cela ne signifie rien. Pour moi, qui l’ai lue avec passion, c’est Virginia Woolf emplissant ses poches de pierres et entrant ce jour-là dans la rivière. Pour toujours. A moins que, ce soir...

LORRAINE

Illustration Wikipédia Commons: Virginia Woolf par George Charles Beresford, en 1902

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Commentaires
L
Oui, des réminiscences curieuses...et frissonnantes!
L
l'empreinte du sensible, l'étreinte de la culture bien digérée...
L
Je suis venue et je reviendrai lire ton blog, il me plaît beaucoup. C'est authentique ce que je raconte, à quelque détail près. Il ne faut pas avoir peur, surtout. La visite de l'ombre me semble plutôt un geste de connivence.<br /> Bisous à toi.
L
En effet, Maz, c'est déroutant et pourtant cette "Présence"ne fait pas peur, c'est plutôt une sensation d'échange, comme si sans rien dire, on se comprenait...
L
Mes visites au Moulin m'enchantent aussi!<br /> Oui, l'invisible est présent, il se manifeste quelquefois, discrètement,comme une visite ou une ombre.J'y suis très attentive. Heureue de partager ce sentiment avec toi.<br /> A bientôt.
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