FEMME DU TEMPS QUI PASSE
Il est passé le temps de l’altière jeunesse
Elle avance déjà d’un pas plus mesuré
Tout au long du trottoir et cache sa détresse
De n’avoir plus vingt ans quand fredonne l’été
Son visage a gardé la douceur des beaux jours
Sa taille se maintient, ses mains ont de la grâce
Mais nul ne sait combien l’allure de toujours
Exige de l’allant aux heures où elle est lasse
S’abandonner au temps comme dans une barque
N’être plus qu’un brin d’herbe emporté par le vent
Vieillir tout doucement sans faire une remarque
Sur le regard distrait lancé par le passant
Comme elle le voudrait certains soirs de tristesse
Quand elle s’énumère le nom de ses amants
Dont pas un n’est venu étancher sa faiblesse
Quand l’âge de raison vint inopinément
C’est une dame seule, élégante et fanée
Qui passe chaque jour lointaine et désuète
Elle ébauche un sourire à demi dessiné
Puis elle disparaît, ombre fluide et muette
LORRAINE