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ECLATS DE PAROLES
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ECLATS DE PAROLES
8 avril 2009

SUIS-JE FOU?

    (Texte écrit d’après une photo prise au hasard parmi un lot d’images.  J’avais choisi le portrait d’un type très sévère,  strictement vêtu,  genre BCBG et peu sympa.  Il fallait écrire au présent, comme un journal intime.)


 

SUIS-JE FOU ?


 

    J’en ai marre.  Toujours ces pensées qui tournent,  ces images informes,  ces êtres qui rôdent autour de moi.  Qui sont-ils ?  Inconnus.  Ils viennent le soir quand je vais m’endormir,  ils me réveillent parfois en pleine nuit.  Non,  cela suffit.  Je le dis,  je le crie même parfois et alors ils disparaissent.  A regret dirait-on.  Que me veulent-ils ? Ils ne me font pas peur,  mais ils me fatiguent.  Sont-ils des esprits ?  Je n’y crois pas. 

 

    Et pourtant,  je suis bien obligé d’admettre que les yeux grands ouverts,  assis dans mon lit,  me pinçant la cuisse pour être sûr de ma conscience éveillée,  ils sont là.  Je croyais que c’était surtout les bonnes femmes qui se montaient le bourrichon et s’inventaient des romans.  J’en riais.  Je ne ris plus.  Je m’inquiéterais plutôt,  si je n’avais,  d’habitude,  les pieds bien sur terre.  Je suis ingénieur,  matheux,  pas du tout influencé par les horoscopes,  la voyance,  toutes ces histoires à dormir debout.

 

    Ca m’agace.  En parler au docteur Joly ? Il me donnera des somnifères et je n’en ai pas besoin.  Et Pierre ?  Est-ce qu’étant petit mon frère ne voyait pas des fantômes ?  C’était un drôle de môme et quand nous dormions dans la même chambre je lui criais « Ta gueule ! » parce qu’il parlait tout haut.  On dirait que ça lui est passé.fant_mes_derri_re_cl_ture  Enfin,  je crois.  Bon.  J’ai fini par aller chez le psy.  Je m’assieds tout droit dans le fauteuil,  je le regarde comme si je voulais l’hypnotiser, c’est plus fort que moi,  je ne peux pas me détendre.  Il me dit : « Vous êtes crispé ».  Et c’est vrai,  mais je dis non.

 

    J’ai déballé en une fois et très vite ce qui m’arrivait.  Il n’a pas ri.  Il était aussi sérieux que moi.  Ses longues jambes le gênaient,  sous le bureau,  il s’est tourné un peu et de guingois,  nous avons parlé.  Enfin j’ai parlé.  Lui ne dit rien.  Ou alors,  il relève le dernier mot de ma phrase : « Résonance ? ».  Et bêtement je dis : « Oui,  j’aime bien ce mot,  je trouve qu’il a un sens ».  Mais je me demande en quoi la résonance va chasser mes visions.

 

    Tantôt,  ma séance avait lieu juste avant un entretien avec M. Lallemand,  un grand type sec qui venait me consulter.  J’étais nerveux.  Cravaté,  la chemise impec,  les ongles limés,  mes lunettes bien ajustées (j’aime les lunettes rondes, elles adoucissent mon visage un peu lourd),  je me suis assis devant le psy. Je ne veux à aucun prix m’étendre sur le divan.  Je ne suis pas déprimé ni dépressif,  simplement je vois des esprits.  Mon amie m’a demandé en se moquant : « Tu es sûr que tu n’as pas une tumeur au cerveau ? ».  Comme si ça allait me rassurer !  Les femmes ont de ces trouvailles !

 

    Je sais que j’ai l’air d’un chef.  Je ne souris pas souvent,  je trouve qu’il faut mener sa vie comme une barque qu’on dirige adroitement.  Mais alors, ces esprits qui brusquement apparaissent dans mes nuits depuis quelques mois,  c’est pas sérieux.  Cela ne peut être.  C’est illogique.  Il faut que je m’en débarrasse.

 

    Des esprits, je ne crois pas que cela existe. Peut-être faudrait-il que je leur parle,  que j’essaie de les isoler.  Parce qu’ils viennent par petits groupes, parfois anodins mais parfois agressifs.  Ils font semblant d’approcher mais alors je me fâche,  je dis « Ca suffit ! » et ils disparaissent.  Puis je dors.

 

    Je ferais bien la causette avec les autres,  les aimables.  Mais chaque fois je suis si surpris que je les regarde en silence.  Ils évoluent devant mon lit.  Ce sont comme des ombres blanches, un peu floues mais ayant forme humaine.

 

    Suis-je fou ?

 

LORRAINE

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Commentaires
L
t'a aidé, Lecouret?...Peux-tu aider le personnage comme il faut à règler ses angoisses? Il t'en serait sûrement reconnaissant!
L
A ton choix! Tout est possible...Est-il fou? C'est comme tu veux. Il s'agit d'une fin ouverte, alors...Bonne journée, Fabeli.
L
il fallait le faire, tu es magicienne des transpositions, des transformations des images en histoires.<br /> en voilà une pas banale, j'ai mis mon entonnoir pour y voir plus clair et j'ai bien aimé ce personnage tout à fait comme il faut...
F
La suite!!!!<br /> que sont ces ombres? Pure invention? Esprits paranormaux? Extra terrestres? hologrammes destinés à rendre fou cet ingénieur détenteur de secrets scientifiques?
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