LA PETITE HEURE TIMIDE DU LAPIN
(Nous devions entamer la consigne par la phrase : "Oh! mon Dieu, j'ai perdu une heure..." et lui donner le titre ci-dessus. Je suis donc partie à la suite du Lapin...)
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Oh ! mon Dieu, j’ai perdu une heure, j’ai perdu une heure !. Elle était pourtant bien là , toute sage, toute menue, sur le cadran de mon réveil, elle allait à tout petits pas ! Où ? Allez savoir !...
Je m’étais arrêté pour faire deux doigts de causette avec le lézard vert, il m’avait crié : « Ne va pas si vite, Lapin, tu as le temps ! ». Alors nous avons échangé quelques mots quand est passé l’oiseau de paradis. Il voletait juste au-dessus de moi et s’est posé. Comme je regardais mon réveil, son sifflotis m’a distrait. C’est un moqueur, l’oiseau de paradis. Il chantonnait :
« Voici le Lapin aux yeux roses qui n’a jamais une minute à lui ! Eh ! l’ami, écoute, je t’ai déniché un coin contre la margelle de la fontaine où le serpolet et la lavande sont d’un moelleux, d’un tendre ! J’ai aussitôt pensé à toi. Ton nez va frémir rien qu’à humer l’odeur . Tu te pourlècheras ! »
Il m’a secrètement indiqué le chemin, je l’ai remercié et suis parti comme une flèche. Ah ! quel festin ! Après j’ai fait un petit somme, j’étais bien. C’est l’orvet qui rampait près de là qui m’a éveillé :
« Quelle heure est-il, Lapin ? »
Les yeux encore tout embrumés, j’ai regardé le cadran et là j’ai vu que j’avais perdu une heure. Je suis parti en courant, l’orvet n’a pas compris et moi depuis, je cherche cette petite heure si belle, si douce. Je l’ai perdue. Où est-elle tombée ? Dans le ruisseau quand je l’enjambais ? Sait-elle nager ? Ou est-elle partie avec un autre lapin ? Les heures sont si complaisantes ! Ou peut-être avec un chamois ? J’en ai vu un qui parlait tout seul. Mais peut-être parlait-il à mon heure ?
C’est vrai qu’elle a des petites jambes pressées quand elle veut. Peut-être va-t-elle vers mon terrier pour me devancer Et si je la rattrape, que ferais-je ? La remettre sur le cadran ? « Pas question, m’a-t-il dit, le temps c’est de l’argent et si tu as perdu une heure, c’est ta faute, garde-la, débrouille-toi »...
Alors, je cours, je cours... Ah ! J’aperçois Alice. Elle saura peut-être, elle, comment on rattrape une heure perdue...
LORRAINE